Texte intégral de l’article (L’Opinion, 06/11/2024)
Journaliste : Emmanuelle Ducros — Édition du 6 novembre 2024.
Le fabricant de pneus Michelin a annoncé mardi la fermeture de deux sites de production, à Cholet et Vannes. Son plan de sauvegarde concerne 1254 salariés. Le distributeur Auchan va quant à lui fermer une dizaine de grandes surfaces et réduire les effectifs de son siège social. Près de 2400 postes vont disparaître.
En une journée, 1254 postes ont été supprimés chez le fabricant de pneumatiques et 2389 chez l’enseigne de grande distribution. Mais il y a pire, à bas bruit Michelin et Auchan, parties émergées de l’iceberg des destructions d’emplois.
Explosion
Journée noire pour l'emploi en France. Le fabricant de pneus Michelin a annoncé mardi la fermeture de deux sites de production, à Cholet et Vannes. Son plan de sauvegarde de l'emploi concerne 1254 salariés. Le distributeur Auchan, en proie à des difficultés récurrentes, va quant à lui fermer une dizaine de grandes surfaces et réduire les effectifs de son siège social. Près de 2400 postes vont disparaître.
Les plans de sauvegarde de l'emploi (PSE) de Michelin et d'Auchan frappent par leur ampleur, comme celui de Casino, en cours, qui devrait finalement toucher 3000 personnes, ou ceux, récurrents, du groupe de distribution de prospectus Milee (ex-Adrexo), qui totalisent 10 000 emplois. Mais ces plans sociaux constituent la face émergée d'un iceberg de destructions d'emplois en cours de constitution.
Il y a d'abord, ce qui est apparent, car encadré par les pouvoirs publics, via les PSE. La CGT a publié, en mai dernier, une « liste noire des plans de licenciement ». Elle recense les plans de plus petite ampleur, passés sous les radars médiatiques nationaux depuis septembre 2023. Le syndicat y compte 130 entreprises dans lesquelles 33 021 emplois ont été supprimés ou sont en passe de l'être — dont 14 611 pour le seul secteur industriel...
Ce n'est pas fini. « Il y a encore des PSE importants en préparation, estime Michel Ghetti, président de France Industrie et Emploi, cabinet spécialisé dans l'accompagnement des entreprises en restructuration. Nous travaillons actuellement sur une bonne dizaine de plans concernant 150 à 200 personnes, qui n'ont pas encore été annoncés officiellement. » Le cabinet d'expertise comptable spécialisé Soxia en a autant...
Renaud Nègre, chez Soxia, constate que les secteurs touchés par les licenciements ne sont pas les mêmes, laissant l'impression d'un malaise profond et général...
« L'analyse de la réalité des destructions d'emplois est encore compliquée par un autre phénomène, souligne Renaud Nègre. Les chiffres de la Dares, donc de l'État, montrent, depuis 2015, une baisse constante du nombre des licenciements économiques... Mais aussi une explosion des ruptures conventionnelles, démissions et licenciements non économiques. Ces derniers sont passés de 100 000 en 2015 à 250 000 en 2022. Nombre d'entreprises s'arrangent pour faire partir les salariés de façon perlée, pour éviter les contraintes des PSE... »
Cela finira par se voir dans les chiffres du chômage... « Ce n'est pas encore le cas, parce que quand les salariés sont inclus dans des PSE, ils bénéficient de procédures de reclassement, de formations qui retardent une éventuelle inscription... Mais, prévient Michel Ghetti, il faut s'attendre à ce que le chômage remonte dès le printemps et à ce que la vague haute nous frappe en septembre 2025 ».