Comment négocier une rupture conventionnelle collective ?

La rupture conventionnelle collective (RCC) est un dispositif permettant à l’entreprise de supprimer des postes en faisant appel au volontariat des salariés sans prononcer de licenciement économique. Comment bien négocier une rupture conventionnelle collective ? Quels sont les thèmes et les enjeux d’une telle négociation ? Qui peut négocier : les délégués syndicaux ou le CSE ?  Quel contenu et quelles indemnités de départ ? Décryptage sur un dispositif délicat à négocier.

 

 

 

 

 

        SOMMAIRE

Qu'est ce qu'une rupture conventionnelle collective ?

La rupture conventionnelle collective (RCC), c’est un accord collectif majoritaire qui vise à faciliter le départ volontaire de salariés. Cet accord pour s’appliquer doit être préalablement validé par l'administration (Dreets).

Il s’agit donc de définir, par la négociation entre les organisations syndicales représentatives et la direction, un cadre commun et collectif de départ strictement volontaire. Seuls les salariés volontaires portant un projet professionnel et dont la candidature a été acceptée par une commission de validation partent.

Négocier une rupture conventionnelle collective : comprendre l'ampleur des enjeux

L'employeur dispose de multiples outils pour agir sur les effectifs de l'entreprise (en savoir plus sur le plan de sauvegarde de l'emploi PSE ici).

Parmi eux, la RCC est destinée à réaliser plusieurs suppressions d’emploi à travers la mise en place de départs volontaires avec un accord majoritaire négocié avec les délégués syndicaux ou le CSE. Quel est l'objet de la RCC ? Faciliter le départ volontaire de salariés pour adapter les effectifs de l'entreprise.

A cet égard, l’intérêt principal de la RCC pour la direction, par rapport à un PSE, est d’éviter l’application du droit du licenciement économique et ses risques associés. En effet, les deux modalités - rupture conventionnelle collective et licenciement économique – sont autonomes l’une par rapport à l’autre.

La rupture conventionnelle collective peut être négociée en présence d’une cause économique : l’avantage pour l’employeur est d’échapper à l’obligation d’élaborer un PSE.

La RCC permet aussi et surtout de ne pas avoir à démontrer l’existence d’un motif économique ce qui offre une sécurité juridique des départs. Le risque prud’homal est ainsi maîtrisé. La RCC n’a pas besoin d’être justifiée par un motif. C’est un élément de départ fondamental à ne pas perdre de vue au cours de la négociation.

Quelles conséquences sur le contenu négociable ?

Parallèlement, la RCC permet de se dispenser de l’obligation d’appliquer l’intégralité des mesures d’accompagnement d’un PSE (article L. 1233-3 du Code du travail). Chaque mesure doit être négociée…

Sur le fond, des mesures suffisamment incitatives doivent être proposées pour que les salariés se portent volontaires. En effet, à défaut de volontaires, l'employeur est susceptible de se retrouver dans une impasse puisqu'un accord de rupture conventionnelle collective exclut par principe « tout licenciement pour atteindre les objectifs qui lui sont assignés en termes de suppression d'emplois » (article L. 1237-19 du Code du travail). Cela implique que les salariés puissent librement opter, soit pour un départ avec les conditions de l’accord collectif, soit pour le maintien dans leur emploi (Questions-réponses du Ministère du travail « La rupture conventionnelle collective »).

Attention, par défaut cet engagement de maintien de l’emploi est lié à la durée de mise en œuvre de la rupture conventionnelle collective. Il est toutefois possible d’aller au-delà dans la négociation. Par exemple s’engager à ne prononcer aucun licenciement économique dans les 12 mois après la fin des mesures d’accompagnement. 

Quel calendrier pour négocier une rupture conventionnelle collective ?

 

Aucun délai légal n’est fixé pour négocier une rupture conventionnelle collective. Pourtant, la possibilité de conclure rapidement un accord de RCC est un élément fréquemment avancé par la direction. Pourtant, cela fait des mois qu'elle y travaille, qu'elle évalue les conditions financières et qu’elle reçoit les conseils adéquats…

Soyez donc prudents.

La pression du temps est souvent utilisée, en positionnant peu de réunions et en exigeant des réponses rapides,

  • pour réduire la réflexion des organisations syndicales et empêcher de véritablement apprécier les conséquences de telle ou telle mesure de la RCC,
  • pour culpabiliser les représentants du personnel et les pousser à réagir à chaud.

Mieux vaut réflexion que précipitation pour négocier une rupture conventionnelle collective.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

négocier une rupture conventionnelle collective

Etapes

Annonce / Engagement des négociations sur la RCC

Le calendrier et les moyens alloués peuvent être négociés dans un accord de méthode. Vous êtes dans cette période ? Contactez-nous !

Information de l'Administration

Information sur l'ouverture des négociations.

Accompagnement à la négociation

Échanges réguliers entre nos experts et les élus CSE + aide à la négociation des Délégués syndicaux (DS)

Signature de l'accord RCC

En présence de délégués syndicaux, l'accord est signé par une ou plusieurs organisations syndicales majoritaires (50%). En l'absence de délégué syndical, l’accord peut être conclu avec les membres du CSE mandatés ou non mandatés

Validation de l'accord par la Dreets (ex Direccte) et lancement de la RCC

L'adhésion des salariés est formalisée par une rupture d’un commun accord

Qui peut négocier une rupture conventionnelle collective ?

L'identité des parties à la négociation varie selon que l'entreprise est pourvue de délégué syndical ou non. Ainsi, dans ce dernier cas, c'est le CSE qui peut négocier. Notez que la voie de la négociation permet de limiter la publicité négative pour l'image de l'entreprise. Un élément important pour la négociation.

En présence d'au moins un délégué syndical

L'accord est valable s'il est signé par un ou plusieurs délégués syndicaux (DS) représentant au moins 50 % des suffrages exprimés lors des dernières élections.

En revanche, si la majorité n’est pas atteinte l’accord peut être valide. Pour cela, deux conditions :

  • être signé par un ou plusieurs DS représentant au moins 30 % des suffrages exprimés lors des dernières élections.
  • être ratifié par consultation des salariés à la majorité des suffrages exprimés.

Il n'y a pas de délégué syndical dans l'entreprise

2 options :

  • l’accord RCC peut être négocié avec les élus du CSE mandatés. Pour être valable, l’accord devra être approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés,
  • la RCC peut être négociée directement avec les élus du CSE non mandatés. Pour être valable, l’accord devra être signé par les membres du CSE représentant la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections.

Quel est le contenu de l'accord de rupture conventionnelle collective ?

Une grande liberté est laissée aux partenaires de la négociation pour définir les éléments concrets qui viendront alimenter les différents thèmes évoqués par la loi.

L’article L. 1237-19-1 7° énumère les mesures négociables dans le cadre d’un accord RCC : le congé de mobilité, des actions de formation, de validation des acquis de l’expérience ou de reconversion ou des actions de soutien à la création/reprise d’entreprise.

De même, l'accord doit notamment prévoir :

  • le nombre maximal de départs envisagés, de suppressions d'emplois associées, et la durée pendant laquelle les ruptures peuvent être engagées (période de volontariat),
  • les conditions d'éligibilité du salarié (c'est la réponse à la question : qui peut se porter candidat ?),
  • les modalités d'examen des candidatures et les critères de départage,
  • les modalités de calcul des indemnités au minimum égales (!) aux indemnités légales dues en cas de licenciement. L'un des cœurs de la négociation porte sur le montant des indemnités  supra-légales.

La liste est non exhaustive.

L'acceptation par l'employeur de la candidature du salarié au départ volontaire emporte rupture du contrat de travail d'un commun accord. Cette rupture ouvre droit pour le salarié aux indemnités de rupture prévues par l'accord. Enfin, la RCC ouvre droit à l’assurance chômage bien que l’objectif ne soit pas celui-ci (articles L. 5421-1 et L. 5422-1 du Code du travail).

Quel est le régime social et fiscal des indemnités de rupture conventionnelle collective ?

Les indemnités versées dans le cadre d'une rupture conventionnelle collective sont intégralement exonérées d'impôt sur le revenu. Cette exonération s'étend aussi aux indemnités versées dans le cadre des mesures visant à faciliter l'accompagnement et le reclassement externe des salariés volontaires (CGI article 80 duodecies, 1-1°), telles les actions de formation ou les actions de soutien à la création ou reprise d’entreprise par les salariés.

Pour les cotisations sociales, les indemnités sont exonérées dans la limite d'un montant fixé à 2 fois la valeur du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 82 272 € en 2021.

L'indemnité de rupture conventionnelle collective serait exemptée de CSG CRDS pour sa part inférieure au montant de l'indemnité légale de licenciement.

Quel est le rôle des élus CSE ?

Le CSE aura un rôle très actif pendant la phase de mise en œuvre de la rupture conventionnelle collective.

En effet, la loi pose le principe suivant : le suivi de la mise en œuvre de l'accord RCC fait l'objet, s'il existe, d'une "consultation régulière et détaillée" du CSE  (article L. 1237-19-7 du code du travail). Les avis du CSE sont transmis à l'administration.

Un élément de négociation à ne pas négliger pour éviter les mauvaises interprétations au détriment des salariés...

La validation de l'accord RCC par la Direction Régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS)

La validité de la rupture conventionnelle collective est subordonnée à une procédure de contrôle mise en œuvre par la Dreets (ex-Direccte). Elle dispose d'un délai de 15 jours calendaires pour valider ou non l'accord collectif.

Que va contrôler l'autorité administrative ?  

  • la conformité de l’accord RCC au principe d’exclusion de tout licenciement pour atteindre les objectifs de suppression d’emplois,
  • la présence des clauses légales obligatoires,
  • le caractère précis et concret des mesures d'accompagnement (elle ne contrôle pas le montant des indemnités supra-conventionnelles),
  • la régularité de la procédure d'information du CSE.

Il s’agit d’un contrôle de légalité. Autrement dit, seules les erreurs manifestes d'appréciation des signataires font l’objet d’un refus de la Dreets. L'absence de réponse de l'administration dans le délai de 15 jours vaut décision implicite d'acceptation.

Dans l’hypothèse d’un refus de validation, un nouvel accord peut tout à fait être négocié. Il tiendra alors forcément compte de la décision de la Dreets pour passer le second examen.

 

Si vous êtes dans ce cas, contactez nous, nous pouvons vous aider à traverser ce moment exigeant :

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